Découverte de 128 nouvelles lunes orbitant autour de Saturne

En 2019, les astronomes ont découvert ving nouveaux satellites à la planète aux anneaux, faisant de Saturne la planète du système solaire ayant le plus de satellites naturels avec un total de 82 lunes. Jupiter l’a ensuite dépassée, avec un total 92 lunes en 2023. Plus tard, au cours de la même année, Saturne est arrivée à 146 lunes, laissant Jupiter derrière elle, avec un joli total de 95...

Mar 14, 2025 - 12:10
Découverte de 128 nouvelles lunes orbitant autour de Saturne

En 2019, les astronomes ont découvert ving nouveaux satellites à la planète aux anneaux, faisant de Saturne la planète du système solaire ayant le plus de satellites naturels avec un total de 82 lunes. Jupiter l’a ensuite dépassée, avec un total 92 lunes en 2023. Plus tard, au cours de la même année, Saturne est arrivée à 146 lunes, laissant Jupiter derrière elle, avec un joli total de 95 lunes.

Mais depuis quelques jours, Jupiter reste loin derrière, dans le sillage de Saturne. Les astronomes viennent d’annoncer avoir détecté 128 nouvelles lunes saturniennes. La planète a donc dorénavant un nombre inconcevable de 274 satellites en orbite autour d’elle.

« C’est une augmentation incroyable du nombre de lunes saturniennes connues et documentées, un nombre qui a toujours été difficile à suivre », confie James O’Donoghue, astronome planétaire à l’université de Reading, en Angleterre, qui n’a pas pris part à la récente découverte.

La nouvelle la plus importante n’est cependant pas le nombre record de lunes documentées. Ces 128 nouveaux satellites ne sont pas comme les lunes saturniennes habituelles, des boules de glace et de roche qui orbitent près de l’équateur de la planète.

Ces amalgames de roche et de glace sont considérés comme des lunes irrégulières, ainsi nommées car elles suivent « des orbites fous », explique Samantha Lawler, astronome à l’université de Regina au Canada, qui n’était pas directement impliquée dans la récente recherche. Elles tournent autour de Saturne selon des angles abrupts, allant souvent à contresens de la rotation de la géante gazeuse.

Ces indications laissent présager qu’un carambolage destructeur pourrait avoir lieu. Il y a de cela plusieurs milliards d’années, des objets célestes faits de roche et de glace se sont vus capturer par le champ gravitationnel de Saturne, devenant ainsi des lunes. Plusieurs d’entre elles sont entrées en collision, faisant tomber le domino qui a engendré une réaction en chaîne violente entre les lunes. Des centaines d’entre elles, de plus jeunes lunes, sont apparues des suites des collisions, chacune étant un fragment de leurs ancêtres annihilés. Ces collisions avaient toujours lieu il y a 100 millions d’années.

C’est ce qui apparente la découverte des 128 nouvelles lunes à rien de moins que compter des grains de sables cosmiques. Elles ajoutent une nouvelle profondeur à l’histoire du système saturnien, encore en construction, dans lequel rien n’est permanent, mais plutôt une sorte de décoration éphémère, qu’il s’agisse des lunes ou des magnifiques anneaux.

 

SATURNE ET SES INNOMBRABLES LUNES

Tout ce que veulent les lunes de Saturne, c’est de l’attention. Cependant, plusieurs astronomes sont particulièrement épris de Phœbé, une lune de taille moyenne découverte en 1898. Son orbite excentrique, qui va à contre-courant de l’orbite de Saturne, l’a depuis longtemps fait entrer dans la catégorie des lunes irrégulières.

De nos jours, Phœbé est bien accompagnée. Au cours des dernières décennies, une floppée de petites lunes irrégulières ont été détectées, souvent en utilisant le télescope de l’observatoire Canada-France-Hawaï, qui trône au sommet d'un volcan hawaïen endormi, le Mauna Kea.

Pour l’instant, tout le monde s’accorde à dire que « Saturne a plus de lunes que toutes les planètes réunies », c’est également le cas de Brett Gladman, l’un des scientifiques ayant découvert les nouvelles lunes.

Brett Gladman, astronome de l’Université de la Colombie-Britannique, à Vancouver, et ses collègues sont derrière les découvertes d’un grand nombre de satellites saturniens. Leurs nombreuses découvertes les ont menés à penser qu’une pléthore de lunes encore plus petites se cachaient dans l’ombre de Saturne, les poussant à élargir leurs recherches.

Le Centre des planètes mineures (Minor Planet Center, MPC) basé dans le Massachussetts, aux États-Unis, est un établissement public qui recense tous les petits objets connus du système solaire. En temps normal, les astronomes s’attendent à l'annonce de la découverte d’une nouvelle comète ou d’un astéroïde. Mais, le 11 mars, c’est à la surprise générale que le MPC a révélé l’identification de 128 nouvelles lunes saturniennes.

« C’était une nouvelle renversante », confie Samantha Lawler. « C’est un nombre si énorme qu’il en devient comique. » Cela fait également entrer Brett Gladman dans l’histoire, comme l’homme qui a découvert, ou participé à la découverte, de plus de lunes que n’importe qui.

« Il ne faut pas oublier que Saturne est à plus d’un milliard de kilomètres de la Terre, le simple fait de pouvoir les détecter est incroyable », s’émerveille James O’Donoghue.

Ces 128 corps célestes ont été officiellement reconnus par l’Union astronomique internationale comme étant des lunes. L’équipe de Brett Gladman fait maintenant face au problème quelque peu atypique de trouver des noms pour chacune d’elles. La convention veut qu’elles prennent le nom d’une figure de la mythologie celtique, inuite ou nordique.

Les suggestions sont les bienvenues. « Cela fait beaucoup trop de lunes, comment sommes-nous censés toutes les nommer ? » demande Paul Byrne, scientifique planétaire de l’Université Washington de Saint-Louis, qui n’a pas pris part à la découverte.

 

CE QUE LES LUNES NOUS APPRENNENT SUR L’HISTOIRE D’UNE PLANÈTE

Aucune de ces nouvelles lunes n’est exceptionnelle lorsqu’on les considère individuellement. Mais chacune est une pièce d'un immense puzzle : celui des lunes originelles de Saturne.

Certaines lunes irrégulières de la géante gazeuse sont regroupées, chaque groupe prenant le nom de son plus grand membre. « Phœbé est comme leur grand-mère », commente Brett Gladman. Cette lune aux larges cratères a subi plusieurs collisions, ce qui ne l’a pas empêchée de survivre durant plusieurs milliards d’années. Elle est aujourd’hui entourée de son propre groupe de lunes plus petites, créées par ces anciennes bagarres.

Le groupe de Mundilfari raconte cependant une histoire différente. Il contient un tel nombre de petites lunes qu’il ne peut être bien ancien. La plupart d’entre elles se seraient percutées et vaporisées peu après leur formation. « Nous pensons que le groupe est issu d’une collision assez récente », explique Brett Gladman. La démolition d’une plus grande lune, au cours des 100 derniers millions d’années, revient en termes astronomiques à parler d'un événement survenu le mois dernier.

La profusion de satellites autour de Saturne n’est pas sans conséquences pour Jupiter. « Tout le monde s’accorde à dire que Jupiter devrait avoir plus de lunes », dit Samantha Lawler. Mais la proximité de la plus grosse planète du système solaire avec la Terre et le champ gravitationnel étendu peut garder les lunes à la périphérie de leur champ de vision, rendant les lunes irrégulières plus difficiles à repérer.

Contrairement à Saturne, Jupiter n’a pas de groupes de jeunes lunes qui gravitent autour d’elle, remarque Brett Gladman. Cela suggère que les lunes de Jupiter n’ont pas subi de collisions récentes, collisions qui auraient pu être à l’origine de la création de plusieurs autres satellites de plus petite taille.

Il ne semble également pas prévu que les grandes lunes de Jupiter se percutent dans un futur proche. Cela désignerait Saturne comme la grande gagnante de cette course aux lunes, pendant encore de nombreuses années. « Je ne pense pas que Jupiter puisse la rattraper un jour », confie Brett Gladman.